Je n'aurai pas d'enfants...
Depuis longtemps, j'avais envie d'écrire quelque chose sur les débats en cours autour de l'homoparentalité : adoption, PMA, GPA... mais je sentais aussi le défi de le faire depuis mon point de vue : certes, je suis homo, mais aussi célibataire consacré dans le sacerdoce. Le temps passait, et je ne trouvais toujours rien à écrire sur ce désir d'enfants de mes frères et soeurs LGBT, et sur les moyens qu'il conviendrait peut-être, ou pas, de mettre en oeuvre à leur service.
Mais la seule chose que je réussis à écrire en étant fondé dans mon expérience personnelle, c'est autre chose, sans savoir si cela pourra aider qui que ce soit, tellement mon chemin est singulier. Voilà : je n'aurai pas d'enfants, et cela ne frustre pas. Je précise : je n'aurai pas d'enfants ni comme "père social" ni comme "père biologique" (désolé les filles, je ne ferai pas de "don" de ces "traces génétiques" (comme disent les flics) qui portent la couleur de mes yeux et la forme de mes oreilles...)
Je voudrais essayer de dire quelque chose sur cette situation à la fois évidente pour moi, et sans doute mystérieuse pour tous ceux qui se sentent "en manque d'enfant". Je ne donnerai donc pas la vie à la manière d'un père. Pourtant ma vie n'est pas perdue. Elle n'est pas quelque chose que j'aurais à transmettre à tout prix. Pourquoi ? Peut-être d'avoir eu (et d'avoir encore) de temps en temps la grâce de sentir avec évidence, dans la prière, que c'est un Autre qui me donne la vie. cette source n'est pas en moi, je sais de Qui elle vient... pas d'angoisse de la perdre.
C'est peut-être aussi parfois d'avoir senti que, d'une autre manière, je donnais la vie. Il y a dans la vie d'un prêtre (et sans doute chez beaucoup d'autres) ces moments d'entretien pastoral, où parfois on entend l'autre trouver les mots qui disent sa vie... découvrir qu'on a été cette oreille qui manquait à l'autre, pour raconter sa vie et lui donner un sens...
C'est sans doute aussi pour ces moments, de temps en temps, où la vie dans sa simplicité est belle et évidente. Où ce qui fait la vie de tout le monde devient joie dans la louange rendue au Créateur. L'émerveillement devant la lumière du soleil et les nuages qui passent, le parfum des roses et la croûte du pain... et de me sentir un petit élément d'un monde immense qui déborde de vitalité.
C'est aussi d'avoir lu dans les livres que la paternité, c'est d'abord celle du Père qui donne la vie au Fils, et que la paternité humaine n'en est qu'un dérivé... mais dans ma vie de chrétien et de prêtre, je suis en phase avec cette paternité fondamentale...