"Tu ne convoiteras pas !"

Publié le par Père Jonathan

Ce commandement essentiel, tant dans l'Ancien que dans le Nouveau Testament, comment peut-il aider à une morale chrétienne de l'homosexualité ?

 

"Tu ne convoiteras pas !" C'est le dernier des commandements du Décalogue. Sur la montagne, Moïse reçoit cette parole du Dieu qui l'a fait sortir d'Egypte : "Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain. Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son boeuf, ni son âne, rien de ce qui est à ton prochain." (Ex 20, 17) Ce qu'on a traduit en latin : "non concupisces" Tu ne convoiteras pas ! Tu n'auras pas de concupiscence !

 

Ce qui est interdit, ici, ce n'est ni le désir ni la possession. Il n'est pas interdit d'avoir une maison, une femme, un serviteur, une servante, un boeuf, un âne. Il n'est pas interdit de désirer sa femme, au contraire : on sait que le jour du sabbat, il est conseillé aux hommes juifs de faire l'amour avec leur femme !

 

Ce qui est interdit, c'est que ce désir devienne fou et qu'il nous fasse oublier le respect du prochain. Ce que je désire peut appartenir à un autre, à mon frère, et je dois le respecter comme lui-même doit me respecter. On sait la folie à laquelle le désir, sans cette loi, peut mener : le roi David en sait quelque chose, lui qui a fait mourir un de ses généraux pour pouvoir posséder son épouse qu'il avait vue prendre son bain sur la terrasse... (cf 2ème livre de Samuel, ch. 11)

 

Jésus reprend ce commandement, pour en préciser le sens : si la convoitise nous fait pécher, c'est d'abord dans notre coeur - c'est donc d'abord du coeur qu'il faut l'en extirper. 

"Vous avez entendu qu'il a été dit : Tu ne commettras pas l'adultère. Eh bien ! moi je vous dis : Quiconque regarde une femme pour la désirer a déjà commis, dans son coeur, l'adultère avec elle." (Mt 5, 27-28)

 

Saint Paul, lui aussi, voit dans la convoitise la racine du péché, au point de faire de l'interdiction de la convoitise le centre de la Loi. (cf épître aux Romains, ch. 7)

 

Au coeur de la morale biblique, à la racine d'une morale chrétienne, résonne donc cet appel lancé par le Dieu sauveur : "tu ne convoiteras pas !" Regardons alors quelques situations contemporaines liées à l'homosexualité...

 

A celui qui est célibataire... "tu ne convoiteras pas celui qui est déjà en couple !" que ton désir soit plein de respect et de charité : il y a dans son histoire une relation fragile et belle avec un autre. Comment pourrais-tu détruire cela, briser un coeur, pour satisfaire tes désirs ?

 

A celui qui est célibataire, encore... "tu ne convoiteras pas le célibataire que tu rencontres !" Certainement, tu le désireras ! Mais quels moyens prendras-tu, pour que ce désir s'accomplisse, et quels moyens refuseras-tu ? Mentiras-tu ? Tricheras-tu ? Iras-tu trop vite, pour le posséder à tout prix, sans respecter le rythme de son désir à lui ? Feras-tu de lui un objet pour satisfaire tes besoins ou prendras-tu le temps de découvrir ce qui le rend unique et fragile ?

 

A celui qui est en couple... "tu ne convoiteras pas les autres !" Oui, la vie de couple est pleine de déceptions, et tu seras tenté de croire que c'est parce que ce serait mieux avec un autre... N'as-tu pas déjà traversé cela ? Apprends un peu de tes expériences ! Comment inventer aujourd'hui une fidélité plus grande, plus vraie ?

 

Mais il y a des manières plus subtiles de convoiter, pour celui qui s'est assuré de la maîtrise de sa sexualité ! Le coeur comme l'esprit peuvent, à leur manière, être habités par une convoitise bien plus grande !

 

Au prêtre fidèle à ses promesses... "tu ne convoiteras pas de tout savoir des autres !" tu ne chercheras pas à imaginer les détails de leur intimité : tout cela n'est que le fruit de ton imagination et ne te mènera nulle part. Et leur intimité, justement, est intime par nature : tu n'en sauras jamais rien. Le soir, en allant au lit, ils ferment la porte. Tu as passé l'âge de regarder par le trou de la serrure !

 

Au confesseur... "tu ne convoiteras pas de tout savoir du pénitent !" Comme si tu étais un juge supérieur et froid, comme si tu étais capable, à la place du pénitent, de vivre dans la justice parfaite. Laisse venir lentement à la parole ce qu'il a à te dire, écoute et parle à ton tour : c'est la vraie rencontre à laquelle le Seigneur t'appelle. Sois discret, ne laisse pas ta convoitise poser trop de questions : ce serait violer la pudeur de l'autre.

 

Au moraliste... "tu ne convoiteras pas la place de Dieu !" Si quelqu'un sait tout de la vie des autres, c'est Dieu, pas toi. Tu ne prétendras pas savoir tout de ce que doivent vivre les autres. Tu ne seras un maître que si tu sais d'abord être un frère !

 

Au chrétien lassé des déclarations vaticanes... "tu ne convoiteras pas la place des cardinaux ou du Pape !" Bien sûr, tout irait mieux s'ils avaient tes qualités au lieu d'avoir leurs défauts... Mais imagine l'inverse ! Vis ta vie de chrétien, là où tu es, sans prétendre savoir ce que tu ferais si tu étais à une autre place : imagination qui te feras oublier ta tâche d'aujourd'hui ! Regarde comment Jésus a changé le monde sans se mettre à la place des chefs des prêtres !

 

Ce commandement, honnêtement, nous l'avons transgressé. Saint Paul l'avoue pour lui-même : "Mais, saisissant l'occasion, le péché par le moyen du précepte produisit en moi toute espèce de convoitise." (Rm 7, 8) Ce n'est pas parce que tu es saint que tu es sauvé par le Christ, au contraire ! Laisse le te retrouver dans la vérité...

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S
Merci mon Père pour cet article si frais et si profond.<br /> Tant de fois, ce magnifique commandemant du Seigneur est réduit à la concupiscence charnelle, sexuelle, à une "police des pensées et des regards". Merci beaucoup de montrer toute la richesse de<br /> cette injonction !<br /> <br /> UdP<br /> Solenne
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